Comment, en tant qu’auteur, abandonner ses propres enfants sur le bord de la route - ceux que, tels des dieux, nous avons créés, enfantés, au long d’histoires, d’anecdotes, de fiction. De vie.
Etre Dieu rien qu’un instant ou le temps d’un roman (ça me fait penser à la chanson de Jacques Brel : « être une heure quelquefois, être une heure rien qu’une durant, beau, beau et con à la fois ») Etre une heure quelquefois ! sublime. Non pas beau et con, mais dieu et diable : celui qui fait naître des personnages, les baptise, leur invente une famille, une généalogie, leur insuffle des défauts et des qualités. Je vous jure que c’est jouissif.
Dieu, s’il existe, doit jouir en permanence de créer tant de créatures, belles ou moches, intelligentes ou connes. Et puis, il les lâche, les abandonne dans la nature, la vie, cette partie d’existence que nous appelons « destinée ».
Avant même d’être couchés sur le papier ou d'être coincés dans l’ordinateur, mes personnages me hantent. Dans mes rêves ou mes cauchemars. Ce sont mes enfants après tout, et en eux il y a un peu ou beaucoup de mon ADN. Ils sont moi sans être moi. Je les aime, même s’ils m’agacent parfois.
Il m’arrive même de leur accorder une trop grande liberté et ils en profitent pour s’échapper ou pour faire des trucs que je n’avais pas prévu.
Camille par exemple (dans mon roman LE VELOURS DE L’ENFER)* lorsqu’elle arrive à Bangkok pour se remettre de deux déceptions amoureuses : l’une avec Paul, brillant éditeur parisien, l’autre avec Doriane, ange troublant entre deux sexes… elle ne trouve rien de mieux que de suivre un géant mi Québécois mi Thaïlandais dans l’un des roof-tops les plus élevés de la capitale Thaïlandaise. Et écouter les fariboles de ce prof aux yeux d’asiatique qui lui raconte l’histoire de la Thaïlande avec son accent des grandes plaines ! Comment résister à quelqu'un qui vous dit "j'ai les yeux dans l'eau" pour "j'ai du chagrin" !
Je ne l’ai pas voulu, et pourtant c’est bien arrivé à Camille.
Va-t(elle suivre Mike le Canadien-Thaï ? Je n'en sais rien... elle fera ce qu'elle veut sans doute.
Car il arrive parfois que les personnages que l'on créé, tout comme les enfants que l'on élève, finissent par vous échapper
J’ai pourtant bien l’intention d’en rattraper quelques-uns au cours de mes prochains blogs.
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