Voler par temps clair ne garantit pas forcément le plus tranquille des voyages. Auscultant le ciel avant d’embarquer à bord d’un Airbus A300 pour Chiang Mai il y a deux jours, je rejoignais mon siège presque sereine : aucune nappe de cirrocumulus ni de puissants cumulonimbus à l’horizon, un ciel d’un bleu azuréen, vaporeux, transparent, infini, le genre de ciel léger, parfait en principe pour un vol d’une heure vers les montagnes du nord.
Je n’aime pas l’avion et lorsqu’il existe une autre option – train ou bus – c’est souvent celle-là que je privilégie, mais avec deux valises, deux sacs, caméras, ordinateur et 10 kilos de livres, j’ai dû renoncer au voyage terrestre.
Je suis donc confortablement assise en classe affaires – eh oui, ça rassure mon penchant agoraphobe - On a beau me dire qu’en cas d’accident, les meilleurs sièges sont à l’arrière, rien n’y fait, je m’entête à vouloir m’asseoir le plus en avant possible. S’il y avait un strapontin dans le cockpit, je le choisirais pour être la mieux et la plus rapidement informée en cas de problèmes. Je suis attentive à tout changement de rythme des réacteurs, je me penche un peu sur la droite si je trouve que l’engin vire un peu trop sur l’aile gauche, bref, je suis dans un état que l’écrivain américain Erica Jong décrivait très bien dans son livre « fear of flying ».
Je reste concentrée tout le temps du vol, comme si mon seul pouvoir de persuasion, soutenu par quelques mantras inlassablement répétés, maintenait le monstre dans les airs. J’observe les hôtesses que, selon mon humeur, je trouve trop jeunes et jolies… en cas de pépin, elles risquent d’avantage de s’inquiéter pour leur maquillage que pour les passagers – ou jamais trop âgées. Avec leurs « heures de vol », elles rassurent mon angoisse permanente, leurs rides sont là pour me prouver que les avions ne crashent pas tous les trois jours.
Je jette un œil sur les gros titres du journal de mon voisin, tout en continuant de formuler mes mantras. Je m’accroche soudain au siège : « hier un vol de la Thaï Airways pour Chiang Mai a dû faire demi-tour, un de ses réacteurs ayant pris feu »... Le genre d’info que l’on préfère lire après atterrissage, mais pas en plein vol, même dans un ciel serein. Et là, d’un coup, l’avion se met à vibrer. On dégringole de quelques étages, tandis que le signal « attachez vos ceintures » s’allume et que les hôtesses courent à leur poste. Mon sang ne circule plus et pourtant j’ai le pouls qui bat a… C’est quoi le maxi ?
Je me promets de ne plus jamais remonter dans un avion. Plus jamais, Ça murmure un peu à l’arrière, pas de panique vraiment, mais des petits cris étouffés. Je scrute les hôtesses… elles plaisantent entre-elles. Ce n’est donc pas si grave ? Après 5 minutes de rock and roll, le signal lumineux s’éteint, on peut détacher à nouveau nos ceintures. Mon pouls ne reprendra son rythme normal qu’à l’atterrissage. C’était il y a deux jours. Aujourd’hui je suis dans un train Chiang-Mai – Uttaradit, pour retrouver mon « Phra Anusorn » au temple Wat Klaang. 6 h.30 pour faire 250 kilomètres. Le train date des années soixante. Une véritable antiquité. Seules les hôtesses sont fraiches et agréables à regarder. Et cette fois, je ne les trouve pas trop jeunes !
Installation au temple Wat Klaang de Uttaradit de Phra Anusorn
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